"Turquie" : derniers kilomètres

Maku, Iran 1

Jour 1

Quand tu te trouves dans la plus haute ville la seule route possible c'est vers le bas. Un vent léger et 90km de faux plat favorable m'emmènent jusqu'à Horasan. J'arrive 2h en avance et je dois patienter pour rencontrer Emir, mon hôte. C'est un jeune enseignant envoyé dans ce coin paumé avec son collègue et ami Rachid. C'est une ville de tarés, et j'y suis un alien. Je me pose tranquillement sur un banc et 2 minutes plus tard je suis entouré de 10 gamins. La conversation se déroule bien dans un anglo-turc parfait quand des questions concernant le prix de mon vélo et si j'ai de l'argent commencent à sortir des bouches, pas si innocentes, des enfants. C'est le moment de partir et trouver un endroit plus calme, mais les gamins sont partout. Je suis à nouveau entouré mais mon hôte apparaît tel un sauveur.
Dans l'est de la Turquie, les femmes ont pour occupation de rester à la maison et faire des enfants. En moyenne une famille a 4-5 enfants, d'où le besoin conséquent d'enseignants. Dans cette agglomération de 40,000 habitants, on y compte 800 enseignants.
Emir a pour habitude d'offrir à ses invités, ceux qui restent plus d'une nuit, le droit d'être prof d'anglais pour une journée. Je trouve ça excellent pour les enfants. Sans le savoir je me retrouve avec un fou du football (plus que moi) et la soirée se termine logiquement devant un match à la télé et une bière.

Jour 2

La journée commence avec 20km de montée jusqu'à 2200m d'altitude, le plus haut col de mon parcours anatolien. Dans la descente je fais une rencontre inattendue. De loin je vois les silhouettes traînantes de 2 cyclos. Romain vient de Grenoble et pédale vers l'horizon lointain. Son ami, un franco-espagnol, Yayo (???) suit la route de la soie jusqu'à la Chine. Les deux garçons se sont rencontrés en Albanie et depuis roulent ensemble. À midi ils se pètent le bide, quelque chose que je leur déconseille vivement, mais ils ont leur rythme. À mon retour je vais faire un dossier concernant la bonne alimentation pendant un long voyage. Je les laisse dans leur orgie alimentaire et je continue à fond vers ma destination Agri. Mon hôte Furkan, m'accueillit dans la pharmacie où il travaille. Bizarrement son nom est inscrit sur la pancarte. Il me présente à ses amis: un ophtalmologue, un dentiste et 2 gynécologues. On passe la soirée à discuter des coutumes turques, de voyages, et boire de la bière.
Vue depuis le col
Encore un pour la collection
Romain et Yayo
Ophtalmo, cyclo, gynéco, pharma, dentiste

Jour 3

Ce matin Furkan me dévoile un de ses hobbies, la cuisine. Il nous prépare un somptueux petit-déjeuner qu'on dévore avec appétit. Je suis prêt à attaquer l'avant-dernière journée en Turquie. Après le dernier col turc, le mont Ararat et son frère apparaissent en ligne de mire. À chaque coup de pédale je me rapproche un peu plus vers cette majestueuse montagne. J'arrive finalement à Dogubayazit et j'essaie de préparer la suite de mon voyage.
Durant mon séjour en Turquie j'ai pu rencontrer toute sorte de personnes, de milieu et d'éducation différents : des professeurs, des étrangers expatriés, des étudiants, une hippy, des médecins, un militaire. Ils ont tous un point commun, l'hospitalité sans frontières.
Vue depuis le col
Les frère Ararat

Jour 4

Je pars dans le brouillard matinal pour les 35 derniers kilomètres en Turquie. À 10km de la frontière une gigantesque file de camions est formée. Je voudrais savoir combien de temps ça prend pour passer la frontière, probablement 1-2 jours. Je demande à 3 chauffeurs mais on reste désespérément séparés par la barrière linguistique. Comme cadeau d'adieu, je reçois le crachat d'un gamin après m'avoir demandé de l'argent.
J'arrive enfin à la frontière. On contrôle mon passeport 5 fois et on me pose 2 fois les mêmes questions: d'où je viens, quelle est ma profession, quel est mon plan de voyage. Vu le bordel qui règne, il vaut mieux vérifier 5 fois. Je passe devant une dizaine de personnes, comme un VIP. Aucun contrôle des bagages et 15 minutes plus tard je suis sur le sol iranien.
Mont Ararat
La file
Je me dis que échanger de l'argent à la frontière est une mauvaise idée et je zappe la première ville - Bazargan. Je me dirige vers Maku. C'est une ville-rue, très longue, coincée dans un canyon. Je vais dans le premier hôtel croisé. C'est luxueux et cher. Je demande à la réception de m'échanger de l'argent. Ils ne veulent que des dollars. Je leur donne mon unique billet américain mais hélas il est trop "vieux" (???). Je sors à la recherche d'un endroit pour échanger. Je trouve un autre hôtel, 2 fois moins cher (merde), mais ils ne peuvent pas échanger non plus. De retour à mon palace, je leur dis que je dois quitter l'hôtel car je ne peux pas payer. Le manager arrive, m'échange 50€ et me fait 10% de réduction sur le prix de la chambre. Enfin toute est possible en Iran. J'attends avec impatience la suite du voyage perse.
Maku
Vue depuis l'hôtel
La route
Au col
Mont Ararat


1 commentaire :

  1. tu nous fais le récit de voyage le plus saisissant: les endroits visités, les rencontres imprévues, le soucis des détailles, les couleurs, les odeurs, les goûts, les coutumes et les us de gens qui bruitent d'un langage inconnu.... on sent à travers ce magnifique voyage initiatique le privilège dont jouit un voyageur comme toi qui déguste et savoure "that milk of humain kindness" le lait de la tendresse humaine comme disait Shakespeare ! bon courage, bon vent!

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