Jour 1
Première journée au Népal. Je m'engage sur la route principale du pays, celle qui le traverse d'est en ouest. Les locaux l'appellent l'autoroute mais probablement parce qu'ils n'en ont jamais vu une vraie. Les voitures sont rares, quelques camions, beaucoup de bus et de motos, mais l'essentiel du trafic me ressemble. Il faut passer par l'Inde pour apprécier le silence dans sa juste valeur. Je ne dis pas que le chauffeurs ici ne klaxonnent pas à fond, bien au contraire, mais leur nombre réduit joue en faveur du calme et de la paix sonore.
J'avance vers l'est accompagné des cyclistes locaux majoritairement des étudiants sans cartables. En fin de matinée je partage la route avec des travailleurs souvent agriculteurs. Des rizières cernent la route des deux côtés. Au loin c'est la jungle. La route passe à côté de la réserve naturelle Shukla Phanta, habitée par un petit nombre de tigres.
J'arrive au lac Ghodaghodi, apparemment un lieu très touristique. Des cars déposent des tonnes de touristes visitant la petite mare et le temple construit à côté. Je profite de l'animation des lieux pour trouver un hôtel. La concurrence est rude et les prix sont bas.
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Shukla Phanta |
Jour 2
Pour aujourd'hui je prévois une petite journée de seulement 50km. Au matin la région est plongée dans un épais brouillard. J'attends patiemment dans le restaurant de l'hôtel. Il fait chaud et lourd sur l'autoroute népalaise malgré le brouillard. Jusqu'au pont Karnali l'avancée est sans encombre. Je traverse la grande rivière du même nom et je plonge directement dans le parc national Bardia - le domaine du tigre du Bengale. Le comité d'accueil : à gauche une grande famille de singes voleurs moches à courte queue, à droite une famille de singes mignons à longue queue et visage noir. La catégorisation vient de Nathou lors de notre passage à Aurangabad. Pour le première fois je vois les deux races aussi proches l'une de l'autre. Des cerfs et des biches font leur vie dans les bois et s'enfuient à mon passage. Les singes me regardent avec curiosité.
J'arrive à l'entrée du village touristique une quinzaine de kilomètres plus loin. Je suis abordé par un hôtelier népalais, Jack, marié à une française. Après 13km sur une route caillouteuse j'arrive enfin dans leur hôtel. L'endroit est magnifique, un vrai paradis. Les chambres sont des cabanes très simples avec terrasse. La propreté est exemplaire et les prix ultra corrects; 4€ pour la cabane la plus simple, jusqu'à 7€ pour celle de luxe. Il me présente sa femme et son petit garçon. La famille vit 6 mois en France et 6 mois au Népal. Une vie de rêve.
Bien que l'hôtel soit à 100m de l'entrée du parc il n'est pas si simple d'y accéder. Il faut être accompagné d'un guide, obtenir l'autorisation et payer l'entrée. On souscrit également une assurance. L'endroit peut être très dangereux; on peut finir embroché par un rhinocéros, piétiné par un éléphant ou croqué par un tigre. Je laisse la visite de la jungle pour une prochaine fois.
Après un bon dîner autour du feu je m'endors dans le silence imperturbable de la forêt. Une petite anecdote - quand on est autour du feu et la fumée vient sur toi, on dit que tu as pissé sur la route. Drôle de logique népalaise.
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Karnali |
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Ma cabane |
Jour 3
Comme tous les matins, le sud de Népal se réveille dans le brouillard. Pour rejoindre la route principale je dois parcourir 10km dans la forêt sur des pistes sablonneuses (un chemin différent de celui de l'aller) alors j'attends autour d'un bon petit-déjeuner que la visibilité s'améliore. Je quitte ma cabane au fond du jardin aux alentours de 10h pour une journée tranquille, toujours dans le parc national Bardia. Aujourd'hui mon jeu préféré c'est de fatiguer les népalais. Beaucoup de cyclistes tentent de me dépasser mais avec une bonne accélération au bon moment je tue leur enthousiasme. Un seul gars arrive à me faire peur, il est étonnamment rapide avec son vélo basique. Je dois pédaler à fond pendant 5 minutes, des fois à 35km/h, pour lui échapper.
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Dans la forêt |
Jour 4
Je quitte Kohalpur de bon matin car je prévois une longue journée avec Günther. Le brouillard habituel n'est pas encore levé et j'avance avec une visibilité quasi nulle. Une heure plus tard j'entre dans le parc national Banke. Le silence est partout. D'après les panneaux ici vivent des éléphants, des hyènes, des cerfs et toutes sortes de félins. Avec les premiers rayons de soleil, les oiseaux se réveillent et inondent la forêt avec leur chant. Je m'engage dans une série de montées-descentes sur 70km, avec de superbes paysages, le parc en toute sa splendeur. Je traverse de petits villages perdus dans la forêt où des gamins non scolarisés et assoiffés de célébrité m'arrêtent et me demandent de les prendre en photo.
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Le parc national Banle |
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Le parc national Banke |
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Vagabonds |
Remarque, cette fois utile :
Je suis sûr que la question des chiens errants préoccupe beaucoup de cyclistes qui veulent visiter la région. Se faire courser par un quadrupède enragé n'est pas la chose la plus agréable. Je suis frappé par la gentillesse de ces animaux SDF. Pas un seul signe de méchanceté, pas un seul aboiement, et ceci depuis mes premiers jours en Inde.
Jour 5
Pour la première fois la matinée est claire et je profite pour faire une bonne journée, digne d'un cycliste de mon rang. Au menu du jour, une montagne sympathique que je traverse en deux temps trois mouvements. La route est très calme si on oublie les bus surchargés avec une sono démesurée. J'ai l'impression que c'est pour un mariage ou une quelconque célébration.
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Dans la montagne |
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Dans la montagne |
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Bus surchargé |
De retour sur le plat, j'avance à grands pas perdu dans mes pensées. Je me trouve dans une région très bouddhiste. C'est ici même que Bouddha est né. Je quitte l'autoroute pour faire un détour par Lumbini, un grand site religieux. Je me lance sur ce que je pensais être une départementale mais qui s'avère un chemin de sable et de cailloux. La route est très peu fréquentée et silencieuse. Le seul bruit provient de Günther qui sautille de trou en trou. Après 10km de zigzags pour éviter les bosses j'arrive dans la ville de Kapilvastu. Il n'y a aucune indication pour la route à suivre et je demande de l'aide à un policier. Il me dit que ce que je cherche se trouve à 70km (j'en doute fort). Deux minutes plus tard un autre me dit que c'est à 40km mais il essaie de m'envoyer directement à la frontière indienne. Heureusement un de ses collègues le corrige. Je suis enfin sur la bonne route et je vois un panneau indiquant 20km restant. L'orientation et la mesure des distances ne sont pas les points forts du népalais, tout comme l'indien d'ailleurs. Les hôtels ne manquent pas mais ils affichent tous des prix faramineux et une qualité quelconque, des fois médiocre. Un des hôtels m'annonce carrément 40$, sans aucune honte. Je lui rappelle qu'il se trouve au Népal et j'accompagne ma réponse d'un rire amusé. Il me dit qu'il peut me faire une petite réduction, à quoi je lui propose 5€ mais il n'a pas l'air d'accord. Finalement j'atterris dans une maison d'hôte crade sans aucun service. J'arrive à faire descendre le prix de 40% mais c'est toujours cher comparé à ce que j'ai eu jusqu'à présent.
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Départementale |
Jour 6
Je me réveille sous les cris d'un coq insomniaque aux alentours de 3h. Je suis sûr que plus personne ne dort dans le voisinage. Tout d'un coup j'ai envie d'un bon coq au vin.
Je visite le parc Lumbini où se trouve le temple Maya Devi - le lieu exact de la naissance de Buddha. Je fais l'erreur d'aller à pied car le parc est gigantesque et se fait facilement à vélo. Le temple est construit plus pour protéger les anciennes ruines où les pèlerins déposent leurs dons. Je suppose que dans ce temple il y a plus d'argent qu'à la banque centrale népalaise. Le lieu est symbole de paix et de fraternité entre les peuples. Une flamme éternelle y brûle depuis une éternité; au moins depuis l'année internationale de la paix 1986. On peut y voir également la cloche de la paix - Triratna.
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Maya Devi |
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L'endroit exact de la naissance de Buddha |
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La flamme éternelle |
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La cloche de la paix |
Autour de l'attraction "principale" on trouve une multitude de temples de tous les pays : Thaïlande, Viêt-Nam, Inde, Corée, Chine et beaucoup d'autres, même l'Autriche est présente. Je mets "principale" car trouve les autres temples beaucoup plus intéressants. Ils ne sont pas anciens et datent, pour la plupart, de ces 20 dernières années, mais architecturalement ils sont magnifique. Beaucoup d'autres sont en cours de construction. Pour ce qui d'intérieur, les pays ont investi les moyens : de belles statues de Buddha, des peintures murales et des décorations somptueuses. Je n'ai pas le temps de tous les visiter mais je vous conseille vivement de faire une recherche sur Google. Je ne regrette pas d'avoir fait le déplacement, l'endroit en vaut la peine. Il n'y a pas une foule de touristes et l'endroit reste calme, paisible et agréable pour une promenade.
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Monastère thaï |
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Buddha de jade |
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Temple vietnamien |
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Temple chinois |
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Un gros Buddha |
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Temple chinois |
Je retourne à mon hôtel pour récupérer Günther et partir vers la grande ville du coin - Butwal. Je demande à un flic la distance et il m'annonce 100km (un panneau indique 22km), je trouve ce nouveau jeu très amusant.
Sur la route je croise des motards en file devant chaque station d'essence. Le précieux liquide est un luxe au Népal (au même prix qu'en France), ainsi que le chocolat qui est bien plus cher que dans l'Hexagone. Pauvre moi qui aime tant le chocolat. Parlant de chocolat, aujourd'hui dans le parc j'ai croisé des mendiants pour la première fois au Népal. Les enfants m'ont demandé dans l'ordre : des roupies, du chocolat ou des biscuits. C'est peut-être ça qui m'a donné tant envie d'un chocolat ce soir. À Butwal je tombe dans un hôtel sympa, pas trop cher et en discutant avec le gérant je découvre qu'il est le cousin de Jack, l'hôtelier népalais à Bardia. Cela me vaut une bonne réduction qui finance mon chocolat.
C'était ma dernière journée sur le plat des plaines de Teraï et dès demain j'attaquerai la montage népalaise - L'Himalaya.
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Les motards en file |
Cher Edi!
RépondreSupprimerNous sommes tous fiers de toi, bien sur toute la famille Mais aussi toute la Tunisie. pour cela peux-tu te procurer le drapeau tunisien et faire une photo avec, cela va nous faire extrêmement plaisir! bonne chance sur les hauteurs du Népal!
Coucou tonton,
SupprimerTrouver un drapeau tunisien au Népal, ça c'est un challenge. Je relève le défit. Je ne sans pas encore comment mais je réussirai.